Pendant très longtemps, l’origine du club fut attribuée à Mr Pierre Guilbert, père d’André Guilbert, moniteur de la Saint-Loise de 1918 à 1955.
Grâce aux archives de la Fédération française de gymnastique, nous avons pu remonter aux origines de la société.
– Dans « l’Annuaire officiel des sociétés de gymnastique de France » de 1882, on découvre que la Saint-loise est née en décembre 1880. Le président de l’époque s’appelait alors MUET et le chef de gymnastique BRUNIN. -Dans le N° 45 de la revue « Le Gymnaste » du 10 mai 1902, la Saint-Loise est la 706ème société à s’affilier à l’Union des Sociétés de Gymnastique de France (U.S.G.F) créée en 1873. Mais la date de création de la Saint-Loise qui apparaît alors est le 2 mars 1901 ! Que s’est-il passé entre 1880 et 1901?. Cette nouvelle date correspond sans doute à l’arrivée de Mr Pierre Guilbert à Saint-Lô. La Saint-Loise a été agréée à la préfecture sous le N°995, en 1905. C’est une des plus ancienne association de Saint Lô et de la Manche.
LA SAINT- LOISE : UNE SOCIETE TRES ACTIVE DANS LA VILLE
Depuis 1880, la société de gymnastique et de préparation militaire de la Saint-loise se devait de participer à toutes les cérémonies officielles et républicaines. Le 14 juillet était d’ailleurs devenu fête Nationale en 1880. Puis ce seront les cérémonies du 11 novembre à partir de 1919 et celles du 8 mai, à partir de 1946. La société anime la vie saint-loise à de nombreuses occasions : bal du bout de l’an, bal du 14 juillet, soirées au théâtre, démonstrations lors de la fête des alluvions, animations à la laiterie Claudel, construction de chars, défilés …sans oublier le grand goûter à la saint André (pour André Guilbert).
Au 31 décembre, la Saint-Loise organise un bal dans les salons de l’hôtel de ville. Jusqu’en 1957, le succès est attesté par quelques articles de presse et surtout dans le livre des comptes ! Mais en 1958, signe des difficultés qui assaillent la Saint-Loise, le bal aura lieu à Canisy et surtout un journal ose attribué le nom du bal à une autre association : c’est un scandale ! La Saint- Loise demande rectification : ce « bal du bout de l’an » sera le dernier organisé par la société…
Jusqu’en 1944, deux espaces accueillent les animations.
Autour de la « Place des Beaux Regards », devant la cathédrale, les spectateurs assistaient aux démonstrations abrités sous les arbres.
La « Place du Champ de mars » permettait des manifestations importantes comme le rassemblement des enfants des écoles publiques au 14 juillet.
Peu avant, pendant et surtout après les années de guerre, le stade d’Agneaux deviendra le lieu des grands rassemblements, tandis que sur les bords de Vire se tient la fête des alluvions.
LA SAINT-LOISE : UNE SOCIÉTÉ LAÏQUE
De ces origines républicaines, la Saint-Loise conservera longtemps la marque. Sa rivalité avec l’autre société de gymnastique était connue de tous : « l’Espérance » sous le patronage bienveillant de l’Eglise, s’opposait en effet à la Saint-Loise laïque et volontiers anticléricale. Aux dires des témoins de l’époque, la Saint-Loise sortait toujours vainqueur de ce duel. Quant à «l ’Espérance» , elle se consacra finalement au football !
Chaque année, la Saint-Loise participe à la fête des écoles laïques du canton. Elle se déroule à la fin de l’année scolaire, au 14 juillet. Pendant cette journée, les enfants défilent et participent à des spectacles de gymnastique . Chaque écolier montre ce qu’il a appris avec Mr André Guilbert. La Saint-Loise encadre les enfants et réalise des démonstrations (barre fixe, sauts…).
La Saint-Loise de la première moitié du siècle, était volontiers considérée comme « rouge » ,comme une société de « gauche » regroupant essentiellement des ouvriers et gens de conditions modestes. Pourtant pour André Guilbert seuls les jeunes primaient , et il travaillait volontiers avec l’abbé Gauthier de la paroisse de Saint Croix. Dans les années quarante et cinquante, ils furent ainsi les Pepone et Don Camillo des Saint Lois !
LES PRÉSIDENTS DE LA SAINT- LOISE (LISTE NON EXHAUSTIVE)
1880 Mr Muet 1901 Mr Cordier
1905-1911 Mr Besson
1911-1922 Mr Desaunettes
1922-1927 Mr Eanulf
1927- 1930 Mr Herout
1930- 1953 Mr Bourdon
1953- 1956 Mr Lechevalier
1956- 1968 Mr Lenormand
1977- 1979 Mr Dumont
1979- 1985 Mme Lenoël
1985- 1991 Mme Lelandais
1991- 1991 Mme Chaudet
1991- 1995 Mr Veck
1995- 1996 Mr Enkart
1996- 2000 Mr Laurent
2000- 2001 Mr Aubrais
2001-2008 Mr Chapdelaine
depuis 2008 Mr Daguet
LA FAMILLE GUILBERT: 60 ANS AU SERVICE DE LA SAINT-LOISE
Du début du siècle jusqu’à 1956, 3 hommes vont porter au plus haut la renommée de la Saint-Loise : Pierre (le grand père), André (le père) et Pierre (le fils). Trois générations au service de la Saint-Loise…Un grand merci à Mme Janine Guilbert pour sa gentillesse et sa précieuse participation à la réalisation de cette retrospective.
UN DES PREMIERS MONITEURS : PIERRE
Pierre Guilbert est né vers1846 – 48. Il est mort en 1915.Une lettre établie par le recteur de l’Université de Caen au ministre le 21 septembre 1908 évoque la nomination, sur recommandation du dit ministre, de Pierre Guilbert, professeur de gymnastique au nouveau collège de la ville de Saint-Lô. Selon la tradition familiale et celle entretenue par la Saint-Loise dans tous les documents postérieurs, il aurait été le fondateur de la société. En réalité, celle-ci existe déjà depuis une vingtaine d’années.
LE MONITEUR GENERAL DE LA SAINT LOISE PENDANT 40 ANS : ANDRE « l’âme » de la Saint-Loise
André Guilbert succède à son père (année 17 ou 18). Il est moniteur d’éducation physique dans les écoles publiques. Né en 1895 à Caen , André Guilbert avait suivi les cours de l’Ecole Normale. Il était une personne rude, sévère. Sa formation « militaire » le rendait exigeant, notamment dans la tenue de ses gymnastes lors des défilés, des entraînements ou de la dirigée des filles et des garçons… mais il savait aussi distribuer les récompenses. Avec les années, le « père Guilbert » s’est assoupli un peu. André Guilbert était un athlète : il faisait de la gymnastique bien sûr, mais aussi de l’ athlétisme et créait les ballets si célèbres de la Saint-Loise. Il inventa le cercle de fer et les palettes. Suite à la destruction de sa maison en 44, la famille Guilbert s’installe chez un oncle, rue de Bayeux en 1949. Cette maison « Au joyeux Tyrol » est munie d’une vaste salle dans laquelle il organise des cours collectifs de danse (valse, rumba, paso-doble…), et il donne aussi des cours particuliers. Le dimanche après-midi et le soir, des bals sont organisés. Sa femme , sa fille et son fils tenaient la buvette de cet établissement.
Des représentations de gymnastique étaient données dans la salle de bal. Directeur du centre de rééducation des écoles, André Guilbert recevaient aussi dans sa salle des personnes confiées par des médecins pour des problèmes de dos, de pieds plats, des exercices respiratoires … C’est près de cette maison qu’il se ferra renverser par une voiture et décédera le 28 février 1955. La Saint-Loise et la municipalité organiseront les obsèques.
LE PETIT FILS : PIERRE GUILBERT
Pierre Guilbert (1931-1989) succède à son père André comme moniteur général. Excellent athlète (champion de Normandie au saut à la perche, judoka), il est moniteur de la Saint-Loise pendant quelques mois (mars 55-oct 56).
UN CONCOURS DE GYMNASTIQUE EN 1912
Mercredi 29 mai 1912, le « Journal de la Manche » relate le concours de gymnastique qui a eu lieu le dimanche et le lundi précédents, à l’occasion de la Pentecôte.
Cette compétition organisée par la Saint-Loise était le concours annuel de l’Association des Sociétés de Gymnastique de Normandie. Elle rassemblait 49 sociétés, provenant de Normandie, mais aussi de Bretagne, de la région parisienne et même d’Auxerre. La Saint-Loise participait au défilé, mais pas à la compétition.
Au programme de la compétition : enchaînements ‘simultanés’ et ‘alternatifs’ aux agrès : corde, anneaux, échelles, barres parallèles et fixe, saut. Mais aussi : ensembles avec et sans engins, pyramides, pose plastique, boxe, canne et bâton, courses (200 mètres), sauts à la perche, en longueur et en hauteur : l’athlétisme et la boxe font alors partie intégrante de la gymnastique, et la Saint-Loise est encore agréée aujourd’hui pour la pratique de l’athlétisme !
Le Président d’Honneur du concours est le Ministre de la Guerre ! En pleine période de montée des tensions internationales notamment avec l’Allemagne, le rôle que tient la gymnastique dans la préparation militaire est glorifié.
Les récompenses sont sonnantes et trébuchantes, et s’accompagnent d’une sculpture au vainqueur. Pas de médaille d’or, d’argent ou de bronze. Le premier peut recevoir une médaille de vermeil, ou d’argent.
La cérémonie du drapeau décrite dans l’article se retrouve dans le rituel des actuels Jeux Olympiques : c’est la Société qui organise qui garde le drapeau de la fédération.
PRATIQUER LA GYMNASTIQUE A LA SAINT LOISE.. au debut du siécle
La Saint-Loise : une affaire de famille !
Toutes les personnes rencontrées pour la période avant la guerre, étaient arrivées à la Saint-Loise après leurs parents, leurs oncles, avec les frères.
Pour Mme Heubert, entrée à la Saint-Loise en 1931 à 5 ans : » la Saint-Loise était comme ma seconde famille » . Les familles participent souvent ensemble, ce qui était préférable en raison des très nombreux déplacements.
Ainsi dans les années trente, Mr Gabriel Plantegenest est le secrétaire du comité. Madame Gabrielle Plantegenest, réalise les splendides costumes nécessaires aux ballets, auxquels participe Melle France Plantegenest et elle ne manque pas lors des retours de concours d’apporter des fleurs aux gymnastes qui » improvisent » un défilé dans Saint-Lô. Enfin, Robert le fils n’hésite par à apporter son aide.
Mr Denise se rappelle qu’il fallait du courage pour venir à pied, dans le froid et l’obscurité de la route de Tessy jusqu’à la salle d’entraînement !.
Mais avant guerre, comme après guerre, il n’existe pas beaucoup de clubs sportifs pour les jeunes : la boxe, le judo, le foot et la gym ! et pas encore de télévision pour occuper les longues soirées, et les jeudis Les sorties du dimanche pendant l’été sont ainsi vécues comme des aubaines.
Mr et Mme Louet ont bénéficié en 1958 d’une semaine de ski à Chamonix : 2 personnes par activité et par département, parmi les plus assidues pouvaient espérer partir ainsi. Mr Louet partira peu après pour l’ Algérie avec 5 autres gymnastes. Pour la Saint-Loise se sont autant de jeunes hommes absents pour les sorties estivales, qu’elle finira par ne plus pouvoir accepter.
La Saint-Loise envoyait à ses soldats partis en Algérie des colis (sardines, saucisson, chocolat) mais tous ne sont pas arrivés.
DES DEPLACEMENTS SOUS SURVEILLANCE
Pendant les transports garçons et filles étaient séparés et Mr Guilbert lors du retour la nuit n’hésitait pas à arrêter les camions et à vérifier avec une lampe torche que garçons et filles ne s’étaient pas trompés de véhicules !
Lors des déplacements après la guerre, étaient utilisés des bétaillères, des camions… notamment celui de fruits et légumes de Mr Caroff- Un service de car sera utilisé vers 1955 seulement.
Les retours pouvaient se faire à 4 heures du matin. Une fois, le véhicule est tombé en panne : les jeunes ont dormi dans les reposoirs du » Grand Sacre » à Villedieu (46-47). Le lundi matin les enfants et les adultes étaient fatigués et la directrice de l’école publique pas très contente…
TÉMOIGNAGE
Jacqueline LECHEVALIER, Asnières 28 avril 2001: Nos années « Saint-Loise » 1947-1952
« Notre famille, obligée de quitter Saint Lô en juillet 1944 (chassée un soir par les allemands à l’approche de l’armée américaine) y est seulement revenue pour la rentrée des classes en 1946 (démolition partielle de notre maison par un obus et réparation tardive effectuée par l’Office des H.L.M).
Nous avons retrouvé les anciens habitants de la cité et des voisins, deux sœurs de notre âge nous ont parlé de gymnastique, de danse qu’elles pratiquaient depuis leur retour dans la ville. Leur enthousiasme était communicatif et avec le permission des parents , nous les suivîmes, un soir, ma sœur et moi, en 1947, à une répétition dans une salle de l’école, en face du cimetière. C’était une expédition de 6 à 7.kms aller et retour pour des gamines de 10 et 12 ans !
Les répétitions avaient lieu le soir vers 19 heures jusqu’à 22H30/23 heures ; Les gymnastes les plus vieux, la trentaine en moyenne, les plus jeunes : 8 à 10 ans, se retrouvaient joyeusement 2 fois par semaine dans « l’effort et la sueur » !.
Le responsable André Guilbert énergique et sévère enseignait aux filles les plus jeunes toutes les techniques de la gymnastique, les agrès : barres parallèles, poutre, saut au cheval, arçons…Il nous faisait répéter les mêmes attitudes jusqu’à la fatigue mais je me pliais volontiers à cette école de discipline…
Après ces heures d’effort, d’application et de tension nous aimions, ma sœur, moi et nos deux voisines, nous défouler sur le chemin du retour. Vers 23 heures, les rues de Saint-lô étaient désertes et nous devions marcher 3 bons kms, en empruntant le chemin le plus court pour rentrer à la maison. A cette époque, la ville étaient calme et sans histoire…
Tous les gymnastes quittaient la salle d’entraînement presque en même temps et avant d’arriver vers le champ de Mars, nous discutions souvent bruyamment avant de prendre, chacun et chacune, des directions différentes. Un habitant de la rue du Neufbourg, un soir d’été, excédé par nos arrêts fréquents sous les fenêtres de son immeuble, balança le contenu d’un pot de chambre” par une des ouvertures…
Ce fut une mêlée générale et des rires à n’en plus finir… Nous empestions l’urine jusqu’à la maison! Par la suite, nous évitions de stationner près de ce bâtiment…
Notre plus grand plaisir à toutes les quatre: tirer les sonnettes des portes d’entrée et nous dissimuler un peu plus loin pour savourer l’effet produit!
Des fenêtres s’ouvraient brutalement pour découvrir le visiteur tardif mais ils n’apercevaient que de minuscules silhouettes dans la demi-obscurité des rues peu éclairées, ou perçaient des fous-rires intempestifs! Alors fusaient les insultes avant de refermer bruyamment les fenêtres…Notre cible préférée résidait à l’angle de la rue de Bellevue et de Tessy: 2 fois par semaine vers 23h30 / 24h nous tirions allègrement la sonnette et à chaque fois il sortait sur le pas de sa porte: l’homme d’un certain âge, pour nous un vieillard, en chemises à long pans,
jambes nues, les pieds dans des charentaises, un bonnet de nuit sur la tête et dans la main droite un bougeoir, avec une bougie allumée!!
A chaque fois il criait: « Si je vous attrape, vous aurez une sacrée raclée, à votre âge vous devriez déjà dormir! »
Un jour, après nous être mises d’accord, en chœur, nous criâmes:
– Attention Pépé! Tu vas attraper un rhume! et une de nos voisines la plus effrontée conclut
– Et à cet endroit tu risques d’en avoir pour 7 ans!
Ce jour-là, nous n’attendîmes pas la réaction de l’homme et nous détalâmes joyeusement…C’était l’heureux temps de l’insouciance!!
Au fil des mois, nous acquérions souplesse, endurance et nous apprîmes à danser en groupe et en rythme et même oser des acrobaties au sol…
En été, le dimanche, la Saint-Loise était souvent sollicité par les maires des communes de la Manche et des département limitrophes, pour animer les fêtes locales. Nous attendions ces jours avec impatience. Nous nous déplacions avec des camions: un pour les filles, un pour les garçons.
Le matin, nous défilions dans les rues; les filles en tunique de satin blanc froncée aux épaules et à la taille, s’arrêtant à mi-cuisse (à la grecque) et des tennis blanches; les garçons en maillot de corps blancs, short bleu ciel, socquettes et tennis blanches.
L’après-midi était réservé à la présentation de tous les gymnastes avec démonstrations de leurs savoir-faire aux agrès, en gymnastique au sol et pour les filles, en danse rythmique.
Entre la fin de la journée et 21h, en général, nous avions quartier libre pour flâner à la fête: manège, stands divers, bal, dégustation des produits locaux, etc.…
Puis nous allions souvent dîner chez l’habitant par petits groupes ou collectivement dans la salle des fêtes.
Je me souviens des repas copieux arrosés de cidre.
Parfois, nous les jeunes, pour ne pas vexer nos hôtes, nous devions faire honneur aux agapes entrecoupées d’un trou Normand! Je me demandais alors, en quittant la table, si j’allais pouvoir exécuter correctement l’acrobatie au sol, sans faire trébucher ma partenaire!
Nous n’étions pas des filles caoutchouc de cirque, mais nous étions suffisamment souples pour accomplir diverses figures un peu compliquées et que je crois agréable à regarder puisque de nombreux bravos clôturaient la fin de notre prestation.
Ensuite venait le ballet des massues appelé “feu-follet”; j’aimais faire virevolter ces sortes de bouteilles de bois, à bout de bras: des bandes phosphorescentes et autocollantes les faisaient tourbillonner en un ballet magique de lucioles très apprécié du public…
La soirée se poursuivait avec la danse Hongroise en costume folklorique: jupe froncée jaune avec un galon noir à l’ourlet, corsage blanc à manches bouffantes, boléro noir à lacet, diadème de marguerites avec de longs rubans et bottes noires en caoutchouc.
Dans le ballet “Flore et Zéphir”, nous portions des robes de toile blanche: haut sans manche près du corps, jupe courte en corolle, décorée de grosses fleurs rouges. Les robes tourbillonnaient gaiement laissant voir les cuisses et les petites culottes des danseuses…
Pour le final, le ballet “la Toukinoise” entraînait le spectateur vers le rêve et l’exotisme. Vêtues d’un ensemble noir: pantalon et tunique sans manches, fendue sur les côtés, ceinturée à la taille, avec sur la tête un chapeau conique et des avants bras noirs, le tout agrémenté de paillettes multicolores.
A un certain moment du ballet apparaissait la plus jolie de toutes: Francette! Sous les oh!! de surprise et d’admiration, portant fièrement un petit bikini noir et des avant-bras noirs, le tout très pailletés.
Elle exécutait au sol diverses acrobaties avec une souplesse féline, puis elle s’intégrait au corps de ballet et aux dernières figures et notes de musiques, les applaudissement fusaient de toutes parts: apparaître très dénudée en 1949, sur des scènes de province et de petites communes, était osé et avant-gardiste!
A cette époque, la plupart des costumes ont été confectionnés par les gymnastes et leurs familles.
La mère de nos voisines était experte en travaux de couture et nous l’aidions les après-midi libres et presque tous les week-end, dès la fin de l’hiver.
Dans leur salle de séjour régnait une ambiance active et gaie. Elle actionnait allègrement le pédalier de la “SINGER” qui ronronnait des journées entières…
Nous chantions et discutions en tirant l’aiguille et parfois les aiguillées de fils s’emmêlaient et formaient des nœuds… Nous préférions décorer certains costumes à l’aide de paillettes qui étincelaient lors des fêtes de nuits…
Lorsque tout était fini, repassé, nous prenions des photos pour garder souvenir des costumes et de nos prouesses:
on”s’y voyait déjà”! sur la scène”!!
Les habitants du quartier avaient l’habitude de nous voir costumées, répéter certaines figures importantes des ballets, dans la prairie face à notre cité.
Chaque année, André Guilbert créait un ou deux nouveaux ballets que nous répétions tout l’hiver et le printemps pour être prêtes dès Mai-Juin.
En ce début de l’été 1952, au moment des déplacements et des représentations, j’ai quitté la Saint-Loise à la suite d’une engueulade non méritée, en annonçant que je rapporterais les costumes à la prochaine répétition… Ma sœur me suivit. Je pense que le responsable n’y croyait pas trop, mais pour moi la page était tournée…
Lorsqu’il nous vit déposer les vêtements sur une table, il tenta de nous dissuader:
-Lechevalier, tu ne vas pas faire ça! Je regrette!!
-Il fallait y penser plus tôt! Vous êtes trop injuste!
Et je tournais les talons… Pour moi, l’incident était clos!
Malgré ce départ un peu fracassant, je garde un très bon souvenir de cette époque de ma jeunesse!
A la Saint-Loise régnait une ambiance joyeuse de camaraderie, entre les gymnastes de toutes générations. Elle fut pour nous, “l’école de la vie” et de “l’éducation sentimentale”. »
1955- 1968 : DE LA RUPTURE AU » SOMMEIL » DANS UNE VILLE PROFONDÉMENT TRANSFORMÉE PAR LA RECONSTRUCTION ET LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE
Le décès accidentel de Mr André Guilbert bouleverse tous les habitants de la ville de Saint-Lô. Le texte de Maître Lechevalier permet d’appréhender son implication dans la vie locale, car tous le connaissaient… Malgré les efforts de son fils l’année suivante, et des entraînements qui reprennent sous la conduite de volontaires, la Saint-Loise ne sera plus jamais la même : finis les concours et les ballets…Bientôt il en sera de même pour les sorties estivales.
Cette rupture est aussi celle du temps qui passe, et des jeunes qui changent, dans une ville en phase de reconstruction. Il est souvent plus difficile de les intéresser et de les amener à participer aux fêtes. Ainsi Mme Heubert se souvient du ballet » Arlequin » avec les petites… mais le jour prévu : personne n’était disponible. Mme Heubert a donc pris des enfants de son quartier pour assurer quand même le spectacle. Avant le décès de Mr Guilbert, cette situation aurait été impossible car personne n’aurait osé être absent !.
En Octobre 1969, Mr Lenormand, président de la Saint Loise déclare au service de la jeunesse et des sports : » impossible de payer un professeur par manque de crédits ; Il n’existe aucun projet pour 1970 dans l’état actuel des choses . La société peut être considérée en sommeil » .
Maître Lechevalier, Président de la Saint Loise, Discours lors des obsèques de Mr André Guilbert, Février 1955 :
» C’est avec une profonde tristesse que jeudi dernier, après trois jours d’attente anxieuse la ville, je dis bien la ville de St Lô apprenait la tragique nouvelle :
André GUILBERT avait succombé aux graves blessures dont il avait été victime, au cours du plus banal accident.
On se refusait d’admettre l’épouvantable réalité. La brutalité de cet arrachement dépassait l’imagination. Etait-ce possible ?
On ne verrait donc plus cette populaire silhouette, ce pas agile, ce regard vif derrière ses lunettes ?
Ce cœur sensible, toujours prêt à faire le bien, à se dévouer, pouvait-il s’être arrêté pour toujours ?
Les années ne lui avaient pas imposé le dur sceau de vieillesse. Resté jeune, svelte, nous ne pouvions pas imaginer une mort si brusque, dans des conditions si terriblement pénibles. Il fallut pourtant se rendre à l’évidence.Celui qui, depuis plus de 35 ans avait été (et restera) l’animateur éclairé de la Saint Loise n’était plus.
C’est en 1918, que succédant à son père qui l’avait crée en 1894, André Guilbert prenait la direction d’une des plus vieilles sociétés locales : la Saint-Loise. Sa Saint-Loise à laquelle il allait consacrer sa vie. Le repos ne va plus tenter André Guilbert; sa raison de vivre sera désormais l’accomplissement scrupuleux de sa profession ; son but : le succès de sa société. Jusqu’à la fin il lui aura tout donné.
Mais il aura au moins la complète satisfaction de voir la complète réussite de son œuvre. Débordant le cadre, non seulement de la ville mais aussi de tout le département, André Guilbert et sa Saint-Loise vont bientôt faire connaître et rayonner, dans toute la France, le nom de Saint-Lô. Pendant plus de 30 années ( si l’on excepte les années de guerre ) et sans interruption la Saint Loise sous la conduite de son moniteur-directeur va glaner les plus hautes récompenses (prix d’excellence- félicitation des jurys) aussi bien dans les compétitions nationales ou régionales comme à GRANVILLE- CAEN-DIEPPE-LE HAVRE-ROUEN-VERNON…que dans les concours internationaux de LILLE-CLERMONT-NICE-VICHY-PARIS.
Je pourrais continuer. La liste des concours où participe la Saint-Loise est longue. Les succès éclatants.
C’est à André GUILBERT que nous les devions.
Et les St Lois ne s’y trompaient pas. André Guilbert était prédisposé a être le professeur d’éducation physique qu’il fut.
Il pouvait avec le même bonheur, aussi bien enseigner l’athlétisme sous toutes ses formes que composer ces tableaux délicieux, pleins de fraîcheur et de charmes qui ont fait (et feront encore) la renommée de la sélection féminine.
Qui a donc oublié les fameux ballets : » Hongrois « , » feux follets » et tant d’autres ?
Qui ne se souvient plus de cette grandiose manifestation du cinquantenaire de l’école normale en 1935 au cours de laquelle, 5000 jeunes gens et jeunes filles, venus de tous les coins du département évoluèrent magistralement sous l’unique direction d’André GUILBERT, qui avait tout préparé, tout organisé, tout voulu et tout réussi.
C’est qu’André Guilbert possédait au plus haut point la volonté de réussir ce qu’il entreprenait.
Soutenu par son amour pour sa société, aidé par son talent et son énergie , obéi de tous ses gymnastes grâce à son intelligente et paternelle autorité (n’était-il pas pour eux » Papa André « ) servi enfin par une extrême patience et une longue expérience. Celui que nous pleurons voulait la perfection et savait l’obtenir. Homme courageux, il n’admettait pas la défaite mais la surmontait. Après la tourmente de juin 1944, André GUILBERT tint tête au malheur avec la ténacité de l’homme d’action qu’il était. Avec rien ou presque rien il remis sur pied sa St Loise et triompha de tous les obstacles. Et en 1945 nous fûmes témoins de cette chose magnifique :
dans les ruines de la cité martyre, le général De Gaulle, pouvait passer devant la St Loise reconstituée. Le 5.1.1954, le gouvernement de la République reconnaissant les hautes vertus d’André Guilbert lui décernait, après d’autres décorations, la plus grande des récompenses dans l’ordre de l’éducation physique : » la Médaille d’Honneur d’Or « . Personne plus que lui n’a mieux mérité cette distinction. Personne n’a plus honoré la grande famille des éducateurs de la jeunesse. Telle fut, bien imparfaitement résumée, la vie de l’ami que nous pleurons. Notre douleur est extrême.
En cette heure déchirante, la cité toute entière, les plus hautes autorités administratives, municipales, comme les personnes les plus modestes, toute cette foule ou se retrouvent que des amis profondément attristés rendent l’hommage qui était dû, à l’homme de bien et de devoir que nous perdons. Tous ont voulu lui porter l’adieu : l’adieu de leur profonde reconnaissance, l’adieu de leurs souvenirs affectueux et indéfectibles.
Et hier soir, André GUILBERT, tous vos gymnastes ont fait un serment : Celui de ne jamais oublier ni vos leçons ni votre exemple. De continuer l’œuvre que vous avez créée et que vous leur léguez.
Afin qu’en souvenir de vous la Saint-Loise continue… «
LA FANFARE : UNE CLIQUE POUR MARCHER AU PAS
Lors des défilés, la Saint-Loise marchait au pas grâce à la musique militaire jouée par » sa clique « .
Ce terme de clique rappelle l’ambiance de » la société de gymnastique et de préparation militaire » car une clique est l ‘ensemble formé par les tambours et les clairons d’une musique militaire. » Sambre et Meuse » , » les enfants de troupe « … constituaient d’ailleurs l’essentiel du répertoire.
Cependant, pour rendre un dernier hommage à Mr André Guilbert qui jouait de la trompette, la fanfare apprit la » Marche funèbre « .
La fanfare était composée de clairons, basses, tambours, trompettes d’harmonie, clarinettes, et cymbales.
Environ 25 à 30 musiciens y jouaient et , beaucoup étaient à la fois gymnastes et musiciens.
Lors des retours de la société des fêtes de village, des défilés improvisés sont organisés quelque soit la fatigue ou l’heure tardive. Les jeunes remontent de la gare jusqu’au centre, précédés de la fanfare. Et pas question de laisser traîner les pieds… sinon gare aux coups de pied au c… ,à la tape dans le dos ou sous le menton !!!
Le chef tambour donne la mesure, le chef de fanfare dirige l’ensemble des musiciens. Devant , un enfant » canne major » donne le rythme à la fanfare.
La fanfare accompagnait les gymnastes dans toutes les sorties locales et participait à toutes les manifestations officielles. Bien souvent la fanfare de la Saint Loise précédait d’ailleurs celle de la ville.
DEPUIS 1977 LA SAINT LOISE : UN CLUB SPORTIF OUVERT A TOUS
Le 4 novembre 1976 a lieu l’Assemblée Générale constitutive de l’ association » LA SAINT LOISE « . Cette réunion se tient en présence de Mr Lebrun maire adjoint, Mr Roques inspecteur et Mr Jourdan assistant de la Jeunesse et les Sports. Mr Roques annonce son ambition de redonner vie à la Saint-Loise en sommeil depuis 1967…
Jean-Christian Chaudet, moniteur de la Jeunesse et du Sport, entraîne déjà depuis 1975 un groupe de gymnastes à la salle Beaufils .
La Saint-Loise accueille 79 licenciées pour la saison 1976-1977. Elle va connaître un succès croissant, atteindre une moyenne supérieure à 300 licenciés et découvrir de jeunes talents qui accéderont aux podiums nationaux.
Albert KOVACS prendra la relève en 1991.
NOUVELLES ACTIVITES
La saison 1988 s’ouvre aux plus jeunes à partir de 2 ans avec les sections de baby gym et d’éveil gymnique.
En 1991, deux nouvelles activités débutent : la création du groupe aérobic-streching pour les adultes, animé par Rodica Giurgiu et surtout la GR : gymnastique rythmique. Désormais la Saint-Loise peut attirer petits et grands, de 2 à …100 ans.
Depuis 1977, beaucoup de bénévoles ont participé à la renaissance du club. Accompagnant sa fille, Anica Cantos va ainsi s’investir dans le club pour aider à l’encadrement des plus jeunes.
Depuis 1996, Christiana Manier et Vincent Canavy ont intégré l’équipe…et Christiana est devenue Mme Canavy…Mais cela est une autre histoire, celle de la Saint-Loise du XXIème siècle…
Et voilà comment la Saint-Loise est passée en 120 années …
…D’une activité populaire à un sport spectacle…
…D’un sport masculin à un sport féminin…
…D’un sport autofinancé à un sport largement subventionné…
…D’un sport d’adultes à un sport de jeunes..
LES SALLES DE LA SAINT-LOISE
1880 : début de la Saint-Loise ; Au tout début, nous ignorons les locaux que la Saint-Loise utilisait; Ce furent sans doute ceux de la caserne et des écoles publiques .
Avant 1944: la salle du patronage rue Octave Feuillet (près de la Place de la Mairie)
Le jeudi, jour de repos des enfants, André Guilbert s’occupait du patronage laïc et accueillait les enfants dans la grande salle d’avant guerre. Pour les séances cinéma, il installait de » grands » rideaux avec une » grande » échelle… qui impressionnait beaucoup les enfants. A l’étage de cette salle, se trouvaient des jeux de société, des jeux d’adresse, une grenouille.
En 1940, la salle fut réquisitionnée par les Allemands avant d’être entièrement détruite en juin 1944. Pendant cette période, les enfants continuèrent de s’entraîner sur le Champ de Mars, tout en veillant à respecter le couvre feu. Ce furent les » beaux jours » des amateurs de basket…
APRES LA GUERRE et pendant toute la période de la reconstruction de Saint Lô, le problème du lieu d’entraînement se posera sans cesse au Comité : Il leur faudra beaucoup de patience et de ténacité, à l’exemple de la population saint loise. Pourtant dès décembre 1945 ses activités reprennent dans une ville dont on ne sait si elle sera reconstruite ! Dès l’été 1946, la Saint Loise participe à 10 fêtes locales ! Un dynamisme révélateur de la volonté de construire l’avenir.
1986 : UNE SALLE TANT ATTENDUE !
La construction de l’ensemble sportif du bois Ardent a coûté 4.25 millions de francs HT (Etat 14% , région 7%, Conseil Général 7%, ville de Saint Lô 72 %). L’inauguration de la salle donne lieu à un grand événement et 700 spectateurs se pressent à la soirée de gala…
Il aura fallu 106 années de patience mais surtout un profond changement de la pratique sportive pour que les Saint-Lois se dotent d’une salle de gymnastique adaptée.
Grâce à André Guilbert, la Saint-Loise occupa avant 1940 la salle du patronage laïc.
Après la destruction de 1944, elle s’installa dans la salle de la Remonte, dans les anciens haras.
Le 25 mars 1960 la salle Beaufils accueille les gymnastes mais devant le nombre grandissant de sportifs, la construction d’une salle spécialisée devient indispensable.
Le 27 septembre 1986 est inaugurée la salle du Bois Ardent.
2016 : L’AGRANDISSEMENT
Le 24 juin 2016, à la suite de son agrandissement, la salle du Bois ardent devient le complexe sportif Julien Lebas. `deux nouvelles salles sortent de terre, l’une pour la pratique de la gymnastique rythmique, l’autre pour les petits et le sport adapté.
Le 25 juin 2016, l’association inaugure ses 3 salles de gymnastique et leur donne les noms de Jean-Christian Chaudet pour la salle de gymnastique artistique masculine et féminine, Kséniya Moustafaeva pour la salle de gymnastique rythmique, et Alexandra Vimont pour la salle dediée à la motricité et au sport adapté.